mardi 6 juillet 2010
Retour sur le voyage présidentiel: Le voyage de Néma constitue-t-il un tournant dans la vie politique du pays ? Des raisons pour se poser la question.
Récit.
Quand il arrive, le Président Ould Abdel Aziz surprend par la tenue : une veste, un polo et un pantalon, couleur beige clair… une tenue d’été… sans cravate bien sûr…
C’est une première pour un Président mauritanien. «Décontracté», commenteront certains. «Habillé pour la saison», expliqueront d’autres ajoutant que «le choix vestimentaire est essentiel dans l’image que le public a du Président».
Ici ce sera une image de simplicité, d’humilité que le Président Ould Abdel Aziz a voulu dégager. On est loin du «dictateur» que ses adversaires n’hésitent pas à présenter comme «une brute sans esprit».
Le Président «tout-terrain».
Quand l’avion présidentiel prend les airs et survole Nouakchott, les passagers de droite ont tout loisir à contempler la route qui relie désormais Dar Naim à Toujounine. «Cette route a permis de désengorger l’axe Toujounine-Capitale», commente quelqu’un. Elle permet surtout de viabiliser un hinterland pour cette ville désormais sous la menace de transgressions marines imprévisibles.
D’ailleurs le Conseil des ministres a, il y a quelques semaines, décidé de lotir cette zone en prévision du développement futur de la capitale Nouakchott. Comme si les sphères gouvernementales avaient enfin compris que la ville ne pouvait éternellement s’étirer du nord au sud, en prenant l’axe de la Sebkha (dépression de l’Aftout).
Ce sera dans cette nouvelle zone que seront implantés les projets d’habitats sociaux, les édifices de l’administration et les complexes industriels. Dans quelques années, ce désert ne sera plus désert.
Vu d’en-haut, Nouakchott est devenue une toile de routes goudronnées, désenclavant des quartiers ici, reliant des axes là. La fluidité de la circulation met encore plus en relief le nombre extraordinaire de voitures dans cette ville qui a battu tous les records en terme d’anarchie et de développement non maîtrisé.
Durant tout le voyage – deux heures et demie – le sujet principal est celui-là : l’engagement personnel de Ould Abdel Aziz dans la construction de cette «Mauritanie nouvelle» qu’il a vanté pour se faire élire. Le voyage de Néma sera une étape dans cette construction.
Le combat continue.
Sans avoir été programmé, le Président de la République prend la parole après le maire de la ville et le ministre des transports. Quand il se lève, c’est tout le public qui en fait de même croyant que la cérémonie officielle, côté discours, était finie. Ce n’était pas le cas.
Le Président Ould Abdel Aziz commence par remercier les populations du Hodh pour l’avoir accompagné «dès le début de la fondation de la Mauritanie nouvelle». Avant de promettre que "tous les citoyens bénéficieront des services de base dans la cadre de la décentralisation de l'Etat, relevant que le train du développement du pays prend la bonne direction." Le lancement de la construction d’un réseau de routes à l’intérieur de la ville de Néma.
Dix kilomètres dont la réalisation est confiée à l’Entreprise nationale de l’entretien routier (ENER), en plus de l’aménagement des passes de «El Behga et Knou» sur la route de Walata (cf. encadré). Et, en bonus, le lancement de l’unité d’hémodialyse de l’hôpital de Néma. C’est la troisième du genre depuis l’arrivée au pouvoir de Ould Abdel Aziz (Nouakchott, Kiffa et Néma).
«Je voudrais leur réaffirmer que les réalisations sur lesquelles nous planchons aujourd'hui soit à Nouakchott soit dans les autres zones du pays, et à Nema n'auraient pu être n'eût été la politique de la lutte contre la gabegie que le gouvernement a fait sienne avec votre soutien». Tout y est des grands thèmes de campagne de Ould Abdel Aziz.
De la remise du pays au travail en lançant des chantiers comme la construction des infrastructures de base à la lutte contre la mal gouvernance qui explique selon lui tous les retards pris dans la réussite des programmes de développement du pays. D’où l’insistance sur les sources de financements de tels projets : «Les fonds dépensés pour la réalisation de ces chantiers ne sont en fait que les deniers de l'Etat et du peuple et des potentialités qui allaient en pure perte avec la gabegie qui a prévalu au cours de cette période.
Aujourd'hui, le pays grâce à Allah, va bien, la gabegie a pratiquement pris fin et nous continuons à lutter contre ce phénomène et vous avec nous mais, en dépit de tout cela des séquelles persistent encore». Si les ressources de l’Etat sont bien gérées, elles peuvent suffire pour promettre que «les réalisations que nous sommes en train d'entreprendre toucheront toutes les zones du pays et ne seront pas, comme dans le passé, confinées à Nouakchott entre les mains de prévaricateurs.
Ce sont là des garanties et des engagements que nous avons pris, sur nous, et notre gouvernement planche sur leur mise en œuvre». Routes, forages, adductions d’eau, connexions électriques, amélioration des services de santé… tout est prévu par le Président Mohamed Ould Abdel Aziz qui déclare :
«Il existe un plan pour régler rapidement tous les problèmes dans les différents secteurs sans perdre de temps comme dans le passé qui a été marqué par le recours à la gabegie, le manque de sérieux et d'efficacité.C'est là, le résultat logique de la lutte contre la gabegie et de la symbiose du peuple avec la direction afin de parvenir à l'objectif visé qui est le succès du processus de développement du pays et l'instauration de la sécurité en son sein».
Et comme on ne peut venir dans cette région sans parler d’élevage, le Président de la République a déclaré : «En ce qui concerne l'encouragement aux éleveurs dans cette zone et le développement du pays en général et de la wilaya du Hodh Echarghi en particulier, qui est une wilaya riche et qui n'a pas bénéficié, dans le passé, de l'encouragement de l'Etat et des financements, je voudrais dire qu'il y a des projets que nous envisageons réaliser. Ces projets sont liés au secteur de l'élevage qui est le piler de l'économie de cette zone».
Et d’annoncer le lancement très prochain d’un «projet qui a trait à l'industrie laitière (et qui) vise à encourager les éleveurs et à garantir qu'ils bénéficient des richesses animales, en évitant que les produits d'élevage se détériorent sans que les éleveurs n'en tirent profit, comme ce fut le cas dans le passé. Une telle chose sera rendue possible grâce à un programme que le gouvernement s'emploie à exécuter».
Fidèle à son style «direct», le Président Ould Abdel Aziz n’hésite pas à se faire le porte-parole des administrés : «Tous doivent comprendre que la raison de l'existence de l'autorité locale, c'est de servir le peuple exclusivement, rompant ainsi avec les pratiques du passé et l'utilisation du peuple au service des gouvernants et de l'administration locale. C'est ce que je vous ai dit dans le passé ici même à Nema et c'est ce que je vous répète aujourd'hui. Notre objectif est de servir le citoyen qui nous a élu et nous a permis d'accéder au pouvoir et nous ne le décevrons pas».
La Mauritanie nouvelle commence ici.
«N’Beyket Lahwash», c’est le nom du chef-lieu du tout nouveau département du Dh’haar. Le nom, vous explique-t-on, vient des premières constructions coloniales aux abords de l’ancien puits de N’Beyka. Des cases et des clôtures qui ne survivront pas aux agressions naturelles et à l’éloignement.
Jusque-là, les populations originelles ont été obligées d’aller dans les environs des départements voisins : Walata, Bassiknou et Néma. Certains groupes sont même passés de l’autre côté de la frontière avec le Mali frère. Là existe aujourd’hui la série des «puits des Awlad Dawoud» (hisyâne Awlad Dawoud).
Avec l’érection d’une nouvelle ville, même dans ce «milieu de nulle part», va changer la face de la région. Surtout que l’eau y coule déjà en quantité suffisante. Dans quelques années, ce département aujourd’hui en construction, attirera du monde. On peut facilement imaginer qu’avec une école, un centre de santé, l’eau et un minimum d’infrastructures, N’Beyka deviendra rapidement un centre commercial important dans cette désertique.
Sur un plan sécuritaire, la création d’une telle capitale départementale est un pas vers la reprise en main du territoire national par les autorités centrales. Aussi faut-il imaginer qu’avec l’installation des opérateurs de la téléphonie mobile, ce désert ne sera plus le territoire privilégié de tous les trafics et le lieu de refuge pour les bandes criminelles.
Peut-on trouver un lien entre cette journée chargée pour le Président Ould Abdel Aziz et ce qui allait suivre ? Au lendemain de ce voyage, le Président reçoit Boydiel Ould Hoummoid, président du tout nouveau parti Wi’am et président de la coordination de l’opposition démocratique qui regroupe aussi le RFD, l’APP, Adil et l’UFP – pour ne compter que les partis significatifs. Relance de la proposition de dialogue faite il y a peu à Yahya Ould Ahmed Waghf, président de Adil. A l’époque, les autres partenaires de la COD avait exigé que la demande passe par la présidence du regroupement.
A l’époque, c’était Ahmed Ould Daddah du RFD qui la dirigeait. Aujourd’hui c’est Ould Hoummoid. Le dialogue semble possible (cf. éditorial). Puis intervient le vote de la loi sur la libéralisation de l’audiovisuel par les députés de l’Assemblée nationale.
Sur proposition du gouvernement de Ould Abdel Aziz qui avait promis de la faire passer durant la présente session. Durant sa présentation, le ministre de la communication, Me Hamdi Ould Mahjoub devait inviter les acteurs politiques de l’opposition à accepter d’accompagner l’ouverture des médias publics sur l’ensemble des opérateurs.
L’objectif étant d’en faire un véritable service public. La sérénité affichée au lendemain de la table-ronde de Bruxelles semble avoir donné l’apaisement actuel. Du coup, le pays peut regarder vers l’avant et espérer une relance des ambitions pour la Mauritanie.
MFO
Encadré :
C’est l’Agence de promotion de l’accès universel aux services (APAUS) qui s’occupe du projet de désenclavement des axes reliant Néma à Walata au Hodh Cherguy et Kobeni à Medbougou au Hodh el Gharby. C’est le lancement des travaux pour les deux passes du premier axe qui a été l’objet d’une cérémonie lors du voyage du Président de la République à Néma.
Dans le cadre de ses vocations dont l’amélioration des conditions de vie des populations par l’accès aux services de base, l’agence APAUS a réalisé plusieurs projets dans les régions reculées du pays. Forages, adduction d’eau potable, construction des réseaux électriques et désenclavement, constituant un important investissement pour l’amélioration du bien être social et contribuant ainsi à la satisfaction des objectifs de développement du millénaire.
Comme ces réalisations sont implantées dans des régions difficiles d’accès, il fallait penser à désenclaver les régions concernées. C’est ainsi qu’il a fallu lancer un programme qui permettra d’ouvrir ces zones.
Les aménagements dont les travaux ont été lancés le 28 juin dernier à Néma, s’inscrivent dans le cadre du programme d’activités du Projet de Développement des Services Hydrauliques et Routier (DSHR) de l’Agence, financé par les Fonds Arabes pour le Développement Economique et Social (FADES). «Ils permettront l’accès aux localités en toutes saisons et l’acheminement de la logistique (approvisionnement en carburant, des pièces détachées, l’entretien, les visites, les échanges économiques divers, etc.) nécessaire au bon fonctionnement des centrales électriques et stations de pompages ayant ainsi des retombées positives sur le coût d’exploitation des concessionnaires», selon les termes de la note explicative de l’agence.
Le tracé passe par la passe de Elbehga, quelques petits hameaux et débouche sur la vallée sablonneuse de Oualata par la passe de Knou. Cette piste est communément appelée «Dh’haar» ou piste «Dorsale». Cet itinéraire long de 90 Km est praticable en saison des pluies.
Cependant il évolue, à partir de la passe aménagée de Elbehga, sur un terrain légèrement vallonné alternant sable et affleurement rocheux sur les 20 premiers kilomètres ; ensuite sur terrain plat avec présence d’affleurement jusqu’au Pk25 à partir duquel le tracé serpente entre une zone sableuse carrossable et sur dunes vives où il devient sinueux et difficile sur près de 10 Km. Toujours selon le descriptif de l’agence.
Le Calame
www.cridem.org
Source :
La Tribune (Mauritanie) via barrada.unblog
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