lundi 12 août 2013

Élections municipales et législatives : Le prix du boycott

Le gouvernement a fixé une bonne fois pour toute, un calendrier électoral qui va se dérouler, selon toute vraisemblance, au pas de charge. Les candidatures sont reçues par le représentant Local de la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) entre le Mardi 13 Août 2013 à zéro heure et le Vendredi 23 Août2013 à minuit pour les élections municipales et entre le Mercredi 28 Août 2013 à zéro heure et le jeudi 12 septembre 2013 à minuit pour l'élection des députés à l'Assemblée Nationale. Et c’est justement cet agenda très serré que compte prendre comme prétexte une certaine opposition pour ne pas participer au scrutin tout en supposant que le pouvoir lui même n’arrivera pas à organiser des élections convenables en un laps de temps si court. Mais ce faisant l’opposition commettrait une erreur lourde de conséquence dont elle ne se relèvera pas de sitôt. C’est vrai le calendrier est presque unilatéral. C’est vrai que la majorité et son gouvernement sont en campagne depuis plusieurs mois et utilisent pour ce faire les moyens de l’Etat. C’est vrai que l’opposition radicale n’est pas représentée au sein de la CENI et ses militants sont pourchassés par le fisc et l’IGE. C’est vrai que l’Etat civil n’a pas encore été l’objet d’un audit pour tester sa fiabilité. C’est vrai que les medias publics sont abondamment mis à contribution pour faire une campagne pour l’UPR. C’est vrai qu’avec la SNIM, Tadamoun, le CSA, et la Zone franche de Nouadhibou le pouvoir a des postes à pourvoir qui constituent autant « d’argument » électoraux convaincants surtout en Mauritanie. En revanche le dialogue politique a légué un code électoral que l’opposition serait bien mal inspirée si elle n’en tirait pas profit. L’argument principal que la COD a avancé pour continuer jusqu’ici à siéger au sein de l’assemblée sortante et dont le mandant avait expiré, était qu’elle ne voulait pas se priver d’une tribune où elle pouvait faire entendre un autre son de cloche que celui de la majorité éternelle « applaudissante. » Le même argument tient toujours ! L’opposition doit elle laisser une assemblée qui, en toute logique, devrait durer cinq ans, sans voix de l’opposition radicale ? La COD si elle manœuvre bien pourrait sans peine envoyer une cinquante d’élus à la chambre basse du parlement. Qui plus est avec la loi électorale actuelle, la majorité est pour la première fois en mesure de mordre la poussière et ne s’assurant que d’une majorité relative.
Prévisions
En effet il faudra 74 députés pour s’assurer la majorité absolue dans la prochaine législature, or 80 députés seront élus au suffrage proportionnel renforcé par la disposition d’interdiction du « nomadisme politique ». Alors si on passe en revue les différentes Wilayas, l’UPR arriverait difficilement à atteindre les 74 députés requis. Dans l’hypothèse la plus optimiste pour le pouvoir, on peut raisonnablement penser que l’UPR remporterait les dix sièges en jeu pour le scrutin majoritaire au Hodh El Gharbi mais il ne pourrait arithmétiquement avoir qu’un seul sur les trois en jeu à Amourj. Ce qui lui ferait 11 élus sur 13.
Au Hodh El Gharbi
Au Hodh El Gharbi, l’UPR remporterait Aioun et Tamchekett mais n’aura qu’un siège à Kobenni à cause de la proportionnelle et Tintane lui sera âprement disputée par les islamistes de Tawassoul mais même s’il l’emportait cela lui fera 7 députés sur les 9 que compte la région.
Assaba
En Assaba, l’UPR n’aura aucune peine à remporter Boumdeid et Kankossa mais Barkéol et Guerrou seront disputés par une coalition regroupant le RFD, les islamistes et les soutiens de Moustapha Ould Limam Chaffi et on peut envisager qu’il en perde une ce qui avec le siège proportionnel de Kiffa donnera 6 députés.
Gorgol
Au Gorgol, si l’UPR remporte Maghama et Monguel il ne pourra avoir qu’un siège à Mbout et Kaédi qui sont aux proportionnelles soit 6 élus.
Brakna
Au Brakna , l’UPR pourrait facilement remporter Aleg, Bababé, M’bagne mais Magta Lahjar et Boghé lui seront disputés respectivement par les islamistes appuyés par le RFD et l’UFP dont Boghé est une forteresse inexpugnable. S’il en perdait une l’UPR n’aurait que 8 sièges sur les dix que compte la région.
Trarza
Pour le Trarza, on est presque sûr que Wiam de Boidiel remportera Keur Macene mais le RFD pourrait lui aussi s’incruster à Rkiz ou à Boutilimitt aussi supposons que l’UPR remporte 8 sur les douze en jeu. En Adrar l’UPR pourrait céder le siège de Wadane à El Wiam mais devrait remporter les quatre autres. A Nouadhibou l’UPR aurait un sur les trois en jeu, au Tagant il n’aurait aucune peine à remporter les cinq sièges, mais au Guidimagha il ne pourra avoir que les deux de Ould Yengé et peut être deux sur les 4 de Sélibaby. Enfin l’UPR remportera sans grande peine les 5 députés en jeu en inchiri et au Tiris Zemmour.
Récapitulation
Si on récapitule : 11 + 7 + 6 + 6 + 8 + 8 + 4 + 1 + 5 + 4 + 4 + 1 = 65 sièges, si on y ajoute trois de la liste nationale, trois de la liste des femmes et deux de la liste de Nouakchott, on obtiendra 73 sièges soit moins que la majorité absolue ! C’est une hypothèse tout à fait plausible et l’opposition de la COD serait la plus « bête » au monde si elle laissait le champ libre à l’UPR et à ses affidés pour constituer une assemblée nationale quasi monocolore. Bien entendu stratégiquement le pouvoir fera tout pour que la COD ne participe pas aux élections, il lui fera même miroiter ou croire que l’APP pourrait elle aussi boycotter mais ce ne serait qu’un piège. Il est certain que l’UPR sera confronté à des arbitrages difficiles qui vont certainement laisser des traces. Une opposition bien organisée avec un dédoublement dans les circonscriptions au suffrage proportionnel pourrait aisément remporter la mise ou tout au moins avoir un bloc de plus de 50 députés ce qui est loin d’être négligeable. On sait que les petits partis à cause de la nouvelle disposition qui leur retire le récépissé en cas de non participation à deux élections municipales consécutives pourraient être le refuge de nombreux mécontents des investitures de l’UPR. De plus l’élection municipale est utilisée pour le calcul de la subvention publique des partis politiques ceux-ci devront ils renoncer si facilement à ces subsides dont ils ont besoin pour continuer à fonctionner ?
BC
Source : Le Quotidien de Nouakchott

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