dimanche 9 octobre 2011

Maghama: Deux jours d'émeutes, un enterrement et l'autorité en déroute.




Le 26 septembre, la gendarmerie de Maghama tire et " tue un manifestant du mouvement "Touche pas ma nationalité". Dans la foulée, le Hakem de la Moughataa "prend la fuite". Alakhbar reconstitue les faits sur témoignage de quatre manifestants.

Lundi, 26 septembre


"Lundi 26 septembre à 17 heures GMT, Maghama (sud Mauritanie) s'embrase. La police, la gendarmerie et les jeunes du mouvement Touche pas à ma nationalité s'affrontent un jeune étudiant d'une vingtaine d'années rapporte "Nous étions tous regroupés sur le Terrain Public, désormais "Place Tahrir" depuis le déclenchement des émeutes contre l'enrôlement.

On s'apprêtait à converger vers la Moughataa pour déposer une lettre de doléances mais la police avait décidé de briser le mouvement et ce malgré la détermination des jeunes, la lettre n'arrivera jamais à destination.

quelques encablures du commissariat vers 18 heures la police nous intercepte et jette des grenades sur nous. Nous ripostâmes en jetant des pierres.

Les échauffourées dureront environ deux heures. Finalement, la police et la gendarmerie locales brisent "l'Intifadas". Elles y parviendront en faisant usage de gaz lacrymogènes. "Nous étions obligés de battre en retrait" soutient un autre mais les forces de sécurité, à bord de véhicules, nous poursuivrons jusqu'à l'intérieur des maisons. Partout, l'odeur de gaz lacrymogène empestent, tout le monde suffoque".

A 20 heures. Enfin le calme revient, mais, les manifestants déplorent un blessé: "Ousmane Mangane (cousin de Lamine Mangane qui sera tué par balle plus tard) a été touché à l'épaule".

Mardi, 27 septembre


Mardi, 27 septembre à 09 heures GMT, les manifestants se regroupement à nouveau à ladite "Place Tahrir". Objectif la Maison du livre, devenu le Centre d'accueil des citoyens (CAC), lieu de l'enrôlement.

"Cette fois-ci, comme les autorités ignoraient nos doléances, nous étions décidés à saccager définitivement les lieux de ce Enrôlement raciste", affirme un "talibé (élève coranique)" frôlant la vingtaine. "A 11 heures, le CAC est réduit en cendres: Ordinateurs, tables, dossiers…nous avons tout saccagé ", ajoute le talibé manifestant.

Les manifestants auront également incendié à 11: 30 GMT le Centre de Lecture et d'Animation Culturelle (CLAC). Un chômeur, parmi les manifestant, âgé de 28 ans justifie: "Nous avons brûlé le centre et saccagé les véhicules qui étaient parqués devant: trois ambulances, deux camions-frigos dentistes, un autre camion et un tracteur". Le chômeur manifestant se demande dans un mélange des genre "A quoi servaient ces véhicules, prétendument destinés à l'usage des populations. En cas d'urgence, nous évoquions nous-mêmes nos malades".

A 12 heures, les locaux de l'Elevage sont partiellement détruits, "parce que le vétérinaire qui y est désigné pour la ville n'est jamais sur place. Quand on veut soigner nos bêtes, on est contraint de payer"se justifie notre interlocuteur. " Dans notre élan contestataire ajoute-t-il, nous fumes attendris par les objurgations larmoyantes de l'Inspecteur qui nous suppliait d'arrêter".

Puis, à 12: 30 GMT, les manifestants convergèrent à nouveau à la" Place Tahrir". Leur prochaine étape sera la Moughataa. Entre la Place Tahrir et la Moughataa, se trouve la Brigade de la gendarmerie. "Là, le drame. A 13 heures, le Commandant de la gendarmerie voulait nous obliger à rebrousser chemin. On n'aura pas le temps de répondre, car des balles réelles sifflaient de par tout déjà. Et dans ce jeu assassin c'est le commandant qui tire le premier et à hauteur d'hommes et les autres gendarmes de le suivre. Une balle atteint en pleine poitrine Lamine Mangane.

Agé seulement de 17 ans il rend son ultime soupir sur le coup" s'indigne un jeune qui se prétend ami de la victime et notre bonhomme de fondre en larmes avant de reprendre : "C'est le Commandant qui l'a intentionnellement tué".

Neuf autres manifestants seront blessés, tous par balle. Parmi eux, une fillette de 8 ans touchée à l'aine. Un jeune homme de 14 ans est aussi du nombre des blessés. Tous les blessés seront évacués à l'hôpital régional de Kaédi à quelques 120 kilomètres de Maghama (et 5 heures de pistes impraticables, constate les envoyés spéciaux d'Alkhbar.)

Notre interlocuteur de rappeler par ailleurs qu'au moment où les blessés sont évacués, les gendarmes regagnaient leur caserne. Vers 14 heures, nous nous sommes rendus à la gendarmerie tentant en vain de défoncer le portail. Et à 15 heures, arrivèrent les renforts en provenance de Kaédi.

Mercredi, 28 septembre

Mercredi, 28 septembre à 10 heures, Lamine Mangane est inhumé. Aucun heurt avec les forces de l'ordre, peut-être grâce à l'intervention des notables et du député Niang Mamadou.

L'enterrement terminé, les jeunes retournent à la Place Tahrir. Ils passent d'abord au centre ville et brûlent, à côté du marché, la maison de Mohamed O.Mbeirik, un boulanger. "Il avait à deux reprise brandit une arme contre nous. Deux autres maisons de policiers sont après brûlées. Ils nous avaient empêchés de soumettre nos doléances au Hakem" nous déclare un manifestant.

Le Hakem "en déroute"


Le Hakem d'ailleurs n'aura pas assisté à tous ces événements car dans la confusion, il a pris la poudre d'escampette. Il ne reviendra qu'une fois les renforts de Kaédi arrivés.

Propos de la population de Maghama recueillis par les envoyés spéciaux d'Alakhbar


www.cridem.org


Source :
Alakhbar (Mauritanie)

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire