mardi 5 octobre 2010

Rosso : La grogne des agriculteurs




Dans un pays de droit où l’Etat entend jouer, pleinement, son rôle dans tous les domaines, il est important que chaque membre du gouvernement connaisse la tâche qui lui est impartie. Mais hélas, chez nous, certains n’hésitent pas à s’immiscer dans des rôles qui incombent à leurs collègues, comme si tout était permis! Ces pratiques peu amènes provoquent, parfois des mécontentements, comme c’est le cas des agriculteurs de Rosso, face à leur ministre de tutelle, du développement rural, en l’occurrence.
Certes, il est clair, pour tous, que, pour faire du paddy à la ferme, le MDR est maître d’ouvrage. Cependant, il faut disposer du sol, qui relève du Ministère de l’Intérieur ou celui des Finances ; des semences, des engrais et des pesticides, du Ministère du Commerce; des machines agricoles et des moyens de lutte contre les prédateurs, fournis par le Ministère du Développement Rural; de l’eau, du Ministère de l’Hydraulique; du gasoil, du Ministère du Pétrole et, enfin, de fonds monétaires, via le Crédit Agricole qui devrait, logiquement, dépendre du Ministère des Finances ou de la Banque Centrale.
Force est de reconnaître, pourtant, que ce créneau financier dépend du MDR. C’est dans cette logique que celui-ci a annoncé, lors d’une réunion avec les représentants des agriculteurs une série de mesures de commercialisation du paddy, en lieu et place de son collègue du Commerce, pourtant présent.
Suite à cette annonce, que certains jugent non officielle, des centaines d'agriculteurs se sont réunis, le lundi 20 septembre 2010, à l’hôtel Al Asma de Rosso, dans l’objectif d'examiner le prix du riz/paddy annoncé par le MDR pour la saison hivernale 2010-2011. Sur la base d’un calcul, rapide, de toutes les gammes de comptes d’exploitation, ils ont conclu que ce prix ne tient pas compte de la réalité des coûts de production. En conséquence, ils ont décidé d'envoyer une pétition au Premier ministre, pour solliciter son arbitrage et la réparation des préjudices qui pourraient naître de l’application d’un tel barème, arbitraire, de toute évidence.

En effet, le ministre du Développement Rural a décrété que: «le coût de production est fixé à 346 000 UM l’hectare; le rendement moyen référencié est de 4 tonnes l’hectare ; en conséquence, le prix du kilogramme du paddy est fixé à 86,5 UM, arrondi à 87. En outre, une grille additionnelle est établie, pour introduire une catégorisation des qualités du paddy selon laquelle: pour la catégorie de 50 à 55% du taux d’usinage du paddy, le prix est fixé à 73 UM/kg; pour la catégorie de 55 à 60%, 80,7 UM/kg».
Selon les termes de la pétition des agriculteurs, ce barème entraîne les conséquences suivantes:
Le MDR indique qu’il s’agit, là, d’un coût calculé sur la base d’une moyenne de 4 t/ha; ce qui implique, ipso facto, un préjudice, pour toute la frange d’agriculteurs qui auront obtenu un rendement inférieur à 4t/ha. Les agriculteurs ont unanimement reconnu que cette frange comprendrait, vraisemblablement, la majorité des agriculteurs ayant utilisé les semences dites "bon à semer", parmi lesquels les coopératives et les privés non expérimentés et/ou tous ceux ayant obtenu un rendement d’usinage situé entre 50-60%, parce qu’ils se retrouveront en dessous du coût de revient du kg de paddy fixé à 87 UM.
Aucune disposition n’a été prise, dans ce schéma, pour tous ceux qui auront du paddy de qualité inférieure, entendez riz rouge dont le taux d’usinage est généralement inférieur à 50%, etc.
Les agriculteurs se sont tous interrogés sur la qualité du ministre du Développement Rural à pouvoir annoncer un prix de marché, en lieu et place du ministre du Commerce, pourtant présent, alors qu’il est coutume que cela soit le contraire. S’est-il, en cette occurrence, arrogé, délibérément, les prérogatives de son collègue du Commerce ou faut-il s’interroger sur le pourquoi des trois échelles de prix «proposées»? Deux questions qui méritent réponses.
Le coût de production annoncé par le ministre est justifié, selon ses propres termes, par la prise en considération des vingt rubriques de calcul du compte d’exploitation, suivant un «consensus» obtenu entre les représentants des agriculteurs et la commission technique constituée par le département du développement rural: douze pour et huit contre. Les agriculteurs regrettent la prise de position du ministre qui a pris fait et cause pour la version de ses collaborateurs, au lieu de jouer le rôle d’arbitre.
En conclusion, les agriculteurs ont, unanimement et avec amertume, constaté que le barème imposé ne leur permettra pas d’honorer leurs engagements vis-à-vis du Crédit agricole et des tiers.

Dans leur pétition, ils proposent, en échange, un schéma de commercialisation dont le coût de production est porté à 372 000 UM l’hectare et un mécanisme simplifié de deux échelles de prix correspondantes à une grille de 50 à 57%, pour la première, et supérieure à 57, pour la seconde.

JIDDOU HAMOUD
hjiddou@yahoo.fr

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