jeudi 26 août 2010

Maghama : reportage dans un site de réfugié de retour du Sénégal : « Ari Malé » est-il devenu « ari boré » ?


Matinée du mercredi 18 Août 2010 à 10 H, après les fortes pluies de la veille au camp des rapatriés « Ari-Malé », littéralement « qui arrive trouve le bonheur.» Spectacle désolant. C’est comme si un tsunami était passé par là. Habitations constituées de bâches et de tentes, les unes trouées, les autres déchirées, des huttes éventrées par les fortes précipitations qui s’abattent depuis le début de l’hivernage dans la zone.

Ces rapatriés de huit familles, soit cinquante et quatre personnes au total, sont venus du Sénégal la nuit du 9 Décembre 2010 et déposés à 2 km à l’ouest de la ville de Maghama (Mauritanie), sur un terrain vague, sans aucune infrastructure vitale, par le HCR sous la supervision des autorités locales. Le lendemain, 10 Décembre, l’ANAIR procède à la distribution de la dotation de l’accueil composée de : deux vaches laitières, 100 kg de blé, 6 kg de sucre, 6 litres d’huile, une marmite, un bol, deux petits réchauds à gaz, une natte, une couverture et une petite moustiquaire quelque soit le nombre d’enfants, par famille.
Trois mois plus tard, en Mars 2010, les rapatriés recevront une deuxième distribution de vivres composée de 100 kg de blé, de 6 kg de sucre et 6 litres d’huile.
Ils se plaignent de l’insuffisance de ces vivres qui ne couvrent nullement leurs besoins réels et déplorent l’absence de suivi et de régularité dans la distribution des vivres.
A première vue, les enfants du camp sont dénudés et morveux, le ventre gonflé, signe de la malnutrition qui les affecte sérieusement.

« LE PLUS GRAND MAL, C’EST l’ABANDON DE l’ECOLE PAR NOS ENFANTS »
« Mes enfants étaient scolarisés au Sénégal, mais depuis notre arrivée ici ils ne sont allés à l’école qu’une seule fois ; puis ils ont abandonné à cause de l’éloignement de l’école », se lamente M.T. « Ce qui me fait le plus de mal, ce n’est pas l’absence de vivres, mais l’abandon de l’école par nos enfants ».
B .A, déplore l’absence de vivres depuis six mois : « Nous sommes en plein mois béni de Ramadan, mois de partage et de solidarité, mais nous sommes oubliés et abandonnés ici depuis six mois ». Autre témoignage poignant de D.Diop : « je suis veuve, j’ai huit enfants en charge. Je n’ai aucune source de revenue, et mes vaches et leurs petits sont morts durant la période de canicule. C’étaient de vieilles vaches qu’on nous a donné »
Les rapatriés de « Ari-Malé » ont perdu huit vaches et leurs petits à cause de l’absence de pâturages et la vague de chaleur de Mai à Juillet.
A .IFRA affirme n’avoir reçu aucune dotation de l’accueil. Ses ballots sont confiés à ses voisins. Il ajoute : « quand il pleut, je reste debout attendant la fin de la pluie pour me coucher »
Parmi ces rapatriés, il y’a quatre familles originaires de Maghama où elles ont des parents. Mais elles ont été obligées de rester dans le camp pour bénéficier de la « dotation d’insertion »offerte par l’ANAIR. Néanmoins, elles ne survivent que grâce à la solidarité parentale. Que dire des autres rapatriés originaires du Brakna qui n’ont pas de parents ici ?
Le puits le plus proche du camp se trouve à 500m et se trouve être la propriété d’un éleveur, qui ne permet aux rapatriés de puiser qu’après avoir terminer d’abreuver ses animaux. Pendant la période de canicule, les rapatriés n’ont accès au puits que les après-midi ; la matinée étant consacrées à l’abreuvage des animaux.
Les rapatriés déplorent également l’absence de papiers d’Etat-civil.
Plusieurs sites de rapatriés dans la Moughata de Maghama, sont dans la même situation de détresse et de détérioration progressive de leurs conditions de vie à cause de l’absence totale d’infrastructures liées à l’eau, aux latrines, à l’école et à la santé. Ari malé (qui arrive trouve le bonheur) est-il devenu « ari boré » (qui arrive trouve le malheur) ?

DIALLO AMADOU
CP / MAGHAMA.

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