samedi 28 juillet 2012

Gorgol : ONG pour quel développement ?

S’il est vrai que le concept de « droit d’ingérence humanitaire » est devenu par son caractère universel la passerelle incontournable d’atténuation des souffrances des populations victimes de la famine et autres calamités, il n’en demeure pas moins que les méthodes d’intervention des structures en charge de sa mise en œuvre , ONGs de droit international doivent être revues et repensées pour les hisser à la hauteur de leur mission. Dans l’exécution des différentes interventions qui leur sont dévolues, on s’aperçoit hélas que ces ONGs de stature internationale dérivent – « le » mot à la mode vers une assistance ponctuelle ciblée et insuffisante au détriment du développement durable comme inscrit dans les objectifs du millénaire (OMD) par le nations unies. L’exemple du Gorgol est à cet égard, significatif : Au regard de l’acuité des questions de développement qui s’y posent, la synergie des moyens et des compétences ne devrait-elle pas se traduire par une amélioration qualitative des moyens d’existence dans le long terme en lieu et place d’un éternel recommencement aux effets redondants et inexpressifs ? De la dérive à l'assistanat Aujourd’hui la wilaya du Gorgol est le réceptacle de plusieurs ONG internationales qui interviennent dans différentes localités à travers des programmes et des projets aux contours identiques et souvent duplicatifs. En effet, à la faveur du déficit pluviométrique et de ses effets collatéraux de famine et de malnutrition, la justification est toute trouvée pour sillonner le territoire et tenter d’apporter le sourire à ceux qui dit- on en manque. Dans ce contexte peu reluisant, et sous le regard indiscret d’une administration moins portée sur les questions de développement, ces organisations aux moyens étendus se déploient dans les strictes bornes d’élever le niveau de vie des populations à travers la malnutrition des enfants et de leur génitrice enceinte ou allaitante à l’accès universel des populations à l’eau et l’assainissement en passant par le « food for work » (vivres contre travail) et une dernière activité phare, le cash transfert. A ce titre, le « triangle de l’espoir », zone privilégiée s’il en est est le champ d’expérience le plus achalandé des intervenants, comme des « ministères fourre-tout », ils y débarquent, marquent leur territoire, tentent au mieux de répondre aux besoins vitaux des populations. Dans ce pré carré, tout y est, chaque structure se veut royale, bien présente par le nombre de rotation de ces gros cylindrés de voiture budgétivores dont le ronflement est devenu familier à l’ouïe du jeune famélique. Le triangle est tant sillonné qu’il parait bien s’affaisser, s’asphyxier en cette compagnie au point que celle-ci semble produire les effets contraires que ceux prétendument avancés. Résultat : au-delà des préoccupations majeures ciblées ,en termes d’impact, le sentiment d’échec est le mieux partagé selon les dernières tendances qui concernent la malnutrition ,domaine dans lequel toutes les ONG ou presque prétendent détenir expertise. Parler d’un échec ,ce n’est pas trop dire ,c’est plutôt une manière d’attirer l’attention des uns et des autres sur les méthodes d’action et de leur pertinence dans l’approche jusque là utilisée qui se fonde sur la distribution périodique des aliments enrichis et un suivi guère pointu qu’à peine plus de constance aurait sans doute rendu efficace . Et la répartition totalement déséquilibrée dans l’espace de la wilaya, de ces ongs qui se bousculent repose la lancinante question d’une coordination qui puisse, vraiment coordonner ;du moins valoriser les minuscules acquis engrangés ca et là . Quant à l’instauration tous azimuts de ce qu’on appelle aujourd’hui le « cash transfert » ces structures ne se détournent –elles pas des axes fondamentaux du développement pour se lancer dans la facilité qui du coup font des bénéficiaires de nouveaux mendiants tenus sous perfusion de 15000 UM mensuel. Voilà que des millions sont distribués dans une opacité qui transgresse la transparence criée sur tous les toits alors que les besoins sont tellement criants et demandent assez d’imagination pour pousser au loin les limites de l’insécurité alimentaire. D’autant qu’aussi humbles soient elles ces différentes actions s’effectuent sans contrôle ni suivi par les autorités, pire aucune étude d’impact n’est produite pour évaluer et apprécier le niveau des vies des populations pour en juger de la conduite à tenir. Le phénomène est à ce point répandu que même le Programme Alimentaire Mondiale -institution spécialisée des Nations unies - s’excelle -par dérive- à travers son sous bureau en cette distribution gratuite de l’argent en sous traitant avec des ONG de droit international qui ,en principe doivent venir avec leurs moyens et leur expertise pour les mettre au service des populations et non se substituer aux ONG nationales . De là à ce que la notion « ONG cartable » change de camp, le pas est allègrement franchi si seulement l’on ne parle pas de nouveaux « peshmergas » du développement. Ainsi, Comme si la marche solitaire est devenue le bouclier le plus rassurant pour gérer cette manne financière, les ONG nationales, sont laissées en rade, en dehors de tous les programmes alors que l’exigence dans la réalisation des projets de développement demandent que ces ongs nationales soient associées et bénéficient d’un soutien qui leur confère des aptitudes réelles de gestion de projets. Cette complicité insidieuse chargée de paradoxe tue les structures nationales mais aussi pose la problématique des relations organiques entre d’une part les agences de développement et l’administration d’autre part. Alors que les paradigmes du développement local ne sont plus de mise, la mutation du statut « international » à celui du « local » est devenue plus que banale. Ce glissement subtil qui affecte profondément les rapports entre les différents acteurs de tous genres doit être corrigé le plus vite au risque d’assister à une compétition déloyale qui ne sied point dans un domaine aussi sérieux que la lutte contre la précarité et l’insécurité alimentaire. Possible reconversion La présence de ces organisations sur le territoire de la wilaya est certes un atout considérable en soi. Mais est ce suffisant ? Dans l’optique de la valorisation des potentiels de la wilaya pour un développement durable ,le document officiel de référence est le programme régional de la lutte contre la pauvreté sur lequel toutes les actions doivent s’y inspirer pour permettre un meilleur recadrage des structures de développement qui en fait viennent en appoint aux pouvoirs publics dans la mise en œuvre des priorités . Si l’on considère la manne financière engloutie dans des projets, le travail de qualité effectué par certaines d’entre elles, sans compter les opportunités locales valorisées, on se rend bien compte des limites dans la traçabilité et la diffusion de certaines actions qui peuvent bien faire cas d’écoles. Evidemment les conditions favorables d’un travail dépouillé ne peuvent se faire sans l’implication de l’administration locale qui devait se donner des outils appropriées pour bien jouer sa partition régalienne tout comme les autres partenaires locaux qui doivent se prémunir d’un minimum de background qui les positionne comme interlocuteurs valables. Sans toutefois verser dans un optimisme beat, il est à noter qu’à la lisière du possible, le réalisable est à portée de poigne. Alors, au boulot ! Seybane Diagana Cridem

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