mercredi 18 avril 2012
Au pays du gâchis (2).
Boghé… Mais pour y aller d’Aleg, on passe par Azlatt, cette grande dune qui rompt la monotonie du paysage. La platitude et la noirceur du sol sont interrompus par ce grand «silk», une série de dunes qui se joignent pour ne plus faire qu’une. La difficulté de traverser apparait avec le détour que la route goudronnée est obligé de faire.
Au lieu d’affronter la dune là où elle parait la plus dense, la route fait un virage, dangereux certes mais obligatoire. C’est là où la dune semble mourir, à quelques deux kilomètres à l’ouest de la route (à droite), que la plupart des victimes des exactions commises en 1991 ont été enterrées. En cachette à l’époque.
Quand je suis venu sur place en août 1991, les restes étaient encore visibles. Là aussi, les prédateurs ont sévi. Il y avait bien des gouverneurs, des préfets, des responsables militaires (et politiques) qui ont commis le crime, qui l’ont couvert. Où sont-ils aujourd’hui ? que font-ils ? dans quel camp se trouvent-ils ? que veulent-ils ?
Plus loin, toujours sur cette route qui relie Aleg à Boghé, un village moderne avec une grande auberge appelée «Auberge de l’unité». En mars 2009, il y avait là quelques tentes du HCR abritant les expulsés mauritaniens fraichement rapatriés du Sénégal.
Avec quelques têtes de bétail, un petit fonds financier, une organisation des plus élémentaires, des dizaines de Mauritaniens injustement renvoyés de chez eux, revenaient sur ces terres qui furent les leurs… Aujourd’hui, c’est un gros bourg qui est là, avec une réelle activité économique, une réelle intégration sociale… avec surtout le recouvrement de la dignité et des droits. En mars 2009, Ould Abdel Aziz avait fait un passage par ici, de retour de Kaédi où il avait effectué la fameuse prière de l’absent qui scellait la reconnaissance par l’Etat du mal qui a été fait.
Sur ces terres, ont vécu heureuses des populations qui ont toujours vu une richesse dans leur diversité, une complémentarité dans leurs modes de vie… qui ont fait de la fraternité une seconde religion, de la solidarité une valeur morale… et vinrent des administrateurs avides, des politiques calculateurs… pour s’approprier terres et biens des uns, ils les ont chassés vers l’autre rive prétextant leur non-appartenance à cette Nation… De l’avidité de ceux-là est née la fracture que la Mauritanie mettra du temps à soigner…
Mohamed Fall Oumeir
www.cridem.org
Source :
Oumeir Blogspot (Mauritanie)
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire