Source : La Nouvelle Expression (Mauritanie)
mercredi 2 octobre 2013
L'Editorial de La Nouvelle Expression : Le wali du Gorgol, une démesure éloquente
Nous revoilà après plus d’un mois de vacances … Pendant ce temps, il ya eu beaucoup de choses sur lesquelles nous pouvions écrire. Mais… C’est le cas des wali ou gouverneurs, les hakems ou préfets, les autorités locales synonymes, en grande partie, de bourreaux et de malheur des citoyens de la Mauritanie profonde.
Comme dans les années 90. C’était au Guidimakha. Pour un problème opposant des paysans et des éleveurs (une histoire de chameau), un hakem avait menacé d’écraser la population d’une localité de cette région, comme des mouches.
Encore le Guidimakha. Un hakem avait giflé un Peulh pour son bétail… A Bababé, c’était encore il ya quelques années, pendant la commémoration de la journée de l’arbre, un hakem avait menacé de tuer tout citoyen qui laisserait « son » arbre mourir.
A Kaédi, un préfet avait envoyé une fois le chef de centre de la Sonelec en prison parce que, dans une réunion du développement intégré du Gorgol, «ce Monsieur l’avait contredit ». Un Tchadien qui était présent à cette rencontre était presque tombé à la renverse devant l’attitude du préfet de l’époque, fils d’un colonel de l’époque….
A Kankossa, aussi… En 2013, on pensait révolu le comportement de ce club d’individus inciviques d’un système en décadence. Mais, quand on a entendu les propos tenus par le wali du Gorgol devant les notables de Kaédi, on se dit qu’on est encore loin du bout du tunnel.
Après le tohu-bohu né de la gifle administrée par un jeune commerçant à une femme et qui a conduit des jeunes de la ville à manifester vigoureusement, ce wali n’a trouvé rien de mieux que de dire aux vieux kaédiens que s’ils ne sont pas capables d’éduquer leurs rejetons, il s’en chargerait, lui. Et que si ces vieux n’étaient pas contents, ils n’avaient qu’à… traverser le fleuve.
Des propos dont la petitesse fait de la Mauritanie la dernière des nations civilisées. Servir son pays. Servir ses concitoyens par rapport à sa position dans la sphère décisionnelle du pays est une chance et une mission exaltante. Le patriotisme. Le civisme. Voici le credo que tout citoyen civilisé doit cultiver. Surtout un citoyen investi des pouvoirs pour la gestion de ses concitoyens, comme un gouverneur (wali).
C’est ce que le wali du Gorgol ne sait pas. Ou ne veut pas savoir. C’est triste. Pourquoi nos walis ne veulent-ils pas comprendre que leurs fonctions ne sont pas politiques ? Surtout pas la politique partisane ?
Mais plutôt être au service de la République, au service de l’application de la loi… au service de la légalité. Quand un wali ne peut satisfaire ses administrés, le bon sens lui commande de démissionner. Le représentant local de l’Etat se doit d’être un responsable dont la conduite ne peut rimer avec ostracisme ou dédain du bienêtre du citoyen.
On ne peut et ne doit pas être le bourreau de celui qu’on est censé protéger et servir. Un wali est l’incarnation de l’Etat central au niveau local. Il est un soldat de cet Etat pour l’intérêt des citoyens, sans exception.
Il doit s’investir pour l’harmonie locale, l’entente sociale et la paix des cœurs entre les populations. Et non le contraire. Le wali du Gorgol, comme beaucoup d’autres autorités locales, ont tout eu de la Mauritanie. Pourquoi, au lieu de servir ce pays, ces individus persistent-ils à la desservir ?
Servir la Mauritanie en remplissant leur mission, avec équité et droiture et en agissant conformément à la loi. Uniquement. Autrement, c’est aller contre la loi ; donc contre la Mauritanie. Ce wali-là doit démissionner, répondre devant les tribunaux et l’histoire. Gérer les citoyens de cette manière est une dénégation du sens de l’Etat.
Le wali du Gorgol fait partie de cette espèce qui continue de tirer la Mauritanie vers le bas. Il est l’héritier de ce système que tout digne Mauritanien combat. Le Mauritanien de la Mauritanie débarrassée de la haine, du népotisme, du clientélisme, du tribalisme, du régionalisme, de l’incivisme et surtout du racisme. Mais, les pratiques de ce wali sont loin d’être étonnantes tant il semble agir sous la dictée de l’attelage brinquebalant qui décide de notre devenir.
Il est désespérant de constater que, si l’on n’y prend garde, le combat pour le patriotisme au pays d’Aziz risque d’être perdu d’avance. Car dans l’arène de lutte où les règles sont fixées par ce nouveau roi, on ne peut que rencontrer des lutteurs du genre du wali du Gorgol et ses semblables.
CSM
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