Les deux institutions qui co-administrent le Casier Pilote de Boghé (CPB), à savoir l’UCA et l’UCAB, dirigés, respectivement, par Ndiaye Daouda et Ngaïdé Hamath Moussa, ont adressé, ce lundi, une lettre au chef d’agence de la SOMELEC, lui demandant, expressément, de « suspendre la fourniture de l’énergie à la station de pompage qui alimente en eau le périmètre, jusqu’à nouvel ordre ».
A l’origine de cette décision surprenante qui risque de compromettre la campagne rizicole, ceux qu’ils appellent « les pirates qui exploitent 60 ha, cassant la structure du réseau d’irrigation pour y placer des tuyaux de grand diamètre, pompant l’eau en amont, et privant plusieurs agriculteurs réguliers du CPB de disposer de l’eau d’irrigation ».
Les responsables des coopératives du CPB ont interpellé le hakem de la mouqata’a sur cette question, lors d’une réunion dans son bureau, en présence du maire de la commune et du représentant de la SONADER.
Résultat des discussions, selon ceux-là : « constat d’impuissance, face aux pirates qui se servent gratuitement de l’eau ». Voilà pourquoi les agriculteurs, s’insurgeant contre une situation « qui n’a que trop duré et qui annonce l’imminence de l’échec de la campagne agricole », ont pris la décision de couper l’alimentation en eau, jusqu’à ce qu’une solution soit trouvée.
Interrogé, le hakem de Boghé, Ahmed Miske Ould Mohamed, a d’abord reconnu que le problème lui a été soumis par les deux unions : « cette question, leur ai-je alors expliqué, remonte au milieu des années 80. Elle est si complexe qu’elle mérite d’être soumise à l’étude. J’ai donc instruit la mise sur pied d’une commission chargée de recenser les pirates (noms et prénoms, filiation, origine, profession, superficie exploitée) ».
Selon le chef de l’exécutif départemental, c’est dimanche que cette commission a rendu son rapport qui recense cent exploitants, originaires des localités avoisinantes du CPB, dont une vingtaine de militaires. « Il est tout-à-fait établi que ces exploitations portent un sérieux préjudice à l’approvisionnement en eau du CPB, surtout pour la coopérative de Thialgou (8,9 ha). J’ai transmis le dossier par la voie hiérarchique au MDR qui trouvera une solution acceptable pour tous ».
En attendant la réponse du ministère qui avait été déjà mis au parfum de cette affaire, lors de sa dernière visite à Boghé, la campagne rizicole est volontairement suspendue par les exploitants qui ne supportent plus de prendre en charge des coûts d’énergie qu’ils ne sont les seuls à consommer.
Brahim Ould Ely Salem, CP Boghé
***
Encadré : Dénouement heureux de la crise CPB /Pirates
La décision des exploitants des deux unions qui assurent la gestion du CPB de suspendre, lundi, l’alimentation en eau du périmètre rizicole, pour protester contre ceux qu’ils appellent les « pirates » a porté ses fruits. Le directeur général de la SONADER, Oumar Coulibaly, accompagné de Abderrahmane Khyar Nass, directeur régional du MDR au Brakna, a été dépêchée mardi, à Boghé, pour tenter de trouver une issue heureuse au problème qui oppose riziculteurs et maraîchers.
Aussitôt après son arrivée, le DG de la SONADER a convoqué une réunion, présidée par le hakem de la mouqata’a, avec les acteurs concernés (UCA, UCAP, DR/SONADER, CSV/DRB), pour diagnostiquer les problèmes qui handicapent la filière rizicole et maraîchère, en vue de leur apporter les réponses adéquates, à savoir plus d’usage « non-réglementaire » de l’eau d’irrigation par des exploitants pirates, au détriment des coopératives, ni d’occupation illégale des superficies.
Le DG de la SONADER a d’abord reconnu l’existence de cette zone pirate, ainsi que l’enherbement excessif du canal T 104 et le manque d’entretien du périmètre, avant de s’engager « à prendre en charge les frais de la main d’œuvre pour le désherbage du canal concerné et de gardiennage des zones où il a été constaté l’usage non réglementaire des eaux ».
A la suite d’âpres discussions qui ont duré sept heures d’horloge, les parties concernées ont convenu de remettre en marche la station de pompage, de désherber et d’alimenter le canal T 104 jusqu’au bout, d’amener les pirates à s’acquitter de leurs frais de consommation d’énergie, estimés à 1 604 400 UM, et d’évaluer les superficies emblavées dans les zones illégalement exploitées. Tout est bien qui finit bien, semble-t-il.
Source : Le Calame (Mauritanie)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire