samedi 9 janvier 2010

Brakna/!Centre hospitalier d’Aleg: A quand l’autonomie ?



Unique dans toute la wilaya du Brakna, l’hôpital d’Aleg s’évertue, tant bien que mal, à couvrir les besoins d’une population de plus de 305.000 habitants, répartis dans les cinq moughataas de la wilaya. Pourtant, 35 ans après sa fondation, cette structure régionale ressemble, encore, à n’importe quel centre de santé sis aux confins du pays. Réhabilité, grâce à un financement de l’IDA, en 1998, il souffre, cependant, d’un manque d’équipements. Or, sa position géographique, qui le place au centre des grands axes routiers, devait lui conférer un rôle prépondérant, dans la gestion et la prise en charge des urgences médico-chirurgicales.
Financé dans le cadre de fonds algériens préalablement destinés à une étude de faisabilité du port autonome de Nouakchott, l’hôpital d’Aleg dispose, aujourd’hui, d’un personnel qui dépasse la cinquantaine (54, précisément) dont médecins spécialistes et généralistes, pharmacien, techniciens supérieurs de santé, sages-femmes, infirmiers d’Etat, médico-sociaux et autres bénévoles d’appui. Avec une capacité de 50 lits, l’hôpital régional d’Aleg propose examens de radiologie, traitements en stomatologie, actes de grande et petite chirurgie, échographies et autres diverses consultations. En partenariat avec les mairies, les organisations non-gouvernementales, quelques ambassades, comme celle des USA, et des organismes comme l’UNICEF, l’hôpital dépasse toutes ses contraintes de fond et de forme, pour soulager les populations très pauvres de la wilaya et d’ailleurs.

Des changements remarquables
Sis en plein cœur de la ville, à quelques encablures de l’entrée de la ville, l’hôpital ne se distinguait pas des autres locaux administratifs, comme le dispensaire, le palais de Justice ou même l’école. Rien, aucune plaque d’indication ne permettait aux visiteurs de s’orienter. La grande porte, souvent ouverte, pouvait bien être celle d’un garage, surtout que de vieilles carcasses de voitures avoisinaient une pièce exiguë qui tenait lieu, il y a deux ans, de salle d’urgences, à plus de deux cents mètres des autres services. C’était le délabrement total: hangars déchiquetés, enceinte sale, alentours servant de décharges aux voisins. Les visiteurs et le personnel se confondaient, dans une totale anarchie. Aujourd’hui, malgré la persistance de quelques accrocs, l’hôpital devient de plus en plus présentable. L’administration a été restructurée et dotée d’un secrétariat informatisé. Des plaques d’indication, à l’entrée, permettent, aux visiteurs, de s’orienter vers tous les services de la structure sanitaire. Un redéploiement rationnel de l’espace a permis de placer les urgences à côté des services spécialisés (radiologie, laboratoire, bloc opératoire), avec réhabilitation des hangars, isolement de la maternité, et installation d’un bureau régional de la caisse nationale de l’assistance maladie. Tout comme la gestion, concertée, des modestes fonds dont dispose l’hôpital a permis, entres autres actions, de doter tout le personnel de blouses, d’acquérir des téléphones GFU, d’organiser des sessions de formation, au profit des élèves de l’école de la Santé, d’augmenter les honoraires de la garde, de redynamiser le comité de gestion et de fonder un comité d’indigence.

Problèmes récurrents
Malgré quelques considérations positives, comme la disponibilité de spécialistes et des médicaments essentiels, l’ambulance, le groupe électrogène, l’entière prise en charge, systématique, de l’urgence et de l’indigence, le forfait obstétrical et les prestations d’une quinzaine de services, l’hôpital d’Aleg souffre, encore, de problèmes structurels dont certains datent pratiquement de sa fondation. D’abord, il y a le manque, récurrent, de médecins généralistes. Peu de ceux-ci acceptent d’aller servir à Goueibina (autre nom d’Aleg). L’explication principale serait, selon le docteur Abdoullah Ould Hmeyade, médecin-chef de l’hôpital d’Aleg, liée à la faible rétribution de leurs heures de garde (2000 UM la garde) comparativement à leurs autres collègues d’El Mina ou de Boutilimitt, par exemple, qui touchent, respectivement, 16.000 et 8.000, par nuit de garde. Il y a, ensuite, une insuffisance d’équipements et de personnel de soins et de soutien. L’hôpital, qui dessert toute une wilaya, ne dispose que d’une seule ambulance dont l’obtention a requis la mobilisation de tous les cadres. L’engagement et la détermination personnels de la députée Aminetou Mint Mouloud ont été, à cet égard, très déterminants. Il y a, enfin, le manque d’incinérateurs, pour détruire les déchets médicaux, la carence en certains services, comme l’orthopédie, les difficultés de gestion de la cuisine, la buanderie, la maintenance, le problème de l’eau et de l’électricité. D’autres contraintes, comme la faible motivation du personnel, l’exiguïté des locaux de la maternité ou de la pédiatrie, le manque de logistique – pas de voitures de service – et l’absence d’une cité pour le personnel, sont autant de facteurs qui influent, négativement, sur les prestations de cet hôpital, autour duquel gravitent des centaines de milliers de citoyens dont plus de 95% sont démunis.

Perspectives d’avenir

La position géographique et l’importance démographique des populations qu’il dessert plaident en faveur, d’une part, de son entière autonomie, à l’instar des hôpitaux de Kaédi ou de Kiffa, et, d’autre part, de son extension et de son équipement. Il y a plusieurs mois, une panne électrique a endommagé les appareils d’anesthésie, d’hématologie et de radiologie os/ poumon. Cette situation décourage le personnel et fait fuir les jeunes généralistes. Aussi un cinglant plaidoyer a-t-il été tenu, auprès de toutes les structures du Ministère de la Santé (ministre, secrétaire général et directions centrales) et des partenaires, comme l’UNICEF, l’OMS, FNUAP, HCR, WORD VISION, Ambassade des USA, etc. Les régulières correspondances, entre l’hôpital et des structures sanitaires d’autres pays, comme le centre hospitalier de Bigorre, dans les Pyrénées françaises, présagent de fructueux échanges, dans le cadre de jumelage. En attendant, les responsables de l’hôpital régional d’Aleg entreprennent de redynamiser les comités de gestion et d’indigence et poursuivent la démarche pour le démarrage d’une activité d’orthopédie. Comme quoi, avant de chercher à atteindre les oiseaux en vol, cherchons, d’abord, à atteindre ceux qui ont atterri.
Sneiba El Kory

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